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Antonio Altarriba
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Le ciel dans la tête
Sergio Garcia Sanchez
- Denoël Graphic BD
- Denoël Graphic
- 20 Septembre 2023
- 9782207164891
Grand Prix de la Critique ACBD 2024.
C'est d'une odyssée qu'il s'agit, d'un long voyage plein de périls, de monstres et de merveilles, mais à l'inverse de celui d'Ulysse, un voyage sans retour. C'est l'odyssée de Kikofu Menzelé, qui manque perdre la vie à douze ans au coeur des ténèbres d'une mine de coltran du Kivu, au Congo. Percevant en lui un esprit guerrier, Wamba, le chef de la milice, l'enrôle comme enfant soldat. Ce n'est que le début d'un incroyable périple qui va mener Kikofu et Joseph, son sauveur, à travers sept étapes et autant de rencontres, vers la mythique et imprenable Europe, qui ne pourra être pénétrée qu'au prix de ce parcours initiatique. Forêt, savane, désert, côte libyenne, Méditerranée, l'épouvantable chemin des migrants d'aujourd'hui, mais balayé du souffle picaresque de Don Quichotte, porté par les visions hallucinées du grand Altarriba, traduit en images somptueuses par Sergio Garcia que ses contributions récentes au New Yorker ont hissé au rang d'artiste international.
Altarriba et Garcia nous font traverser une Afrique à la fois parfaitement moderne - déchirée par la violence de ses conflits intérieurs, par les nécessités et les illusions de l'exil - et d'une beauté immémoriale. Loin des éternels récits de migrants minés par la culpabilité postcoloniale, voici l'histoire libre, sans fard mais pas sans grandeur d'une particule élémentaire lancée à la conquête de sa dignité d'homme. -
Depuis la parution en 2011 de L'Art de voler dans la collection Denoël Graphic, les lecteurs conquis réclament souvent une édition de plus grand format qui rendrait mieux justice au travail graphique de Kim et autoriserait une lecture plus confortable des textes, souvent copieux. Considérant que ce titre, avec sa suite, L'Aile brisée, constitue désormais l'un des classiques modernes de la bande dessinée mondiale, nous avons décidé à la faveur de ce dixième anniversaire de satisfaire cette requête. Voici donc, rassemblés en un seul volume relié de 500 pages, d'un format supérieur aux parutions originales, les destins symétriques d'Antonio Altarriba père et de son épouse Petra, qui donnèrent naissance à Antonio Altarriba fils, l'auteur. Côte à côte, ils tracent une formidable fresque espagnole, l'épopée de ces sans-grade qui traversèrent avec une bravoure et une dignité désormais inconnues sous nos latitudes un siècle noir de guerres civile et mondiale, de souffrances, de privations, d'humiliations et d'espoirs jamais vaincus. Cet omnibus constitue en quelque sorte l'édition de bibliothèque définitive d'un diptyque dont se sont emparés aussi bien les lecteurs européens que les instances universitaires.
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Enrique Rodríguez Ramírez est professeur d'Histoire de l'Art à l'université du Pays Basque (où Altarriba a enseigné la littérature française). À 53 ans, il est à l'apogée de sa carrière. Sur le point de devenir le chef de son champ de recherches, en proie aux rivalités académiques, il dirige un groupe d'étude intitulé : "Chair souffrante, la représentation du supplice dans la peinture occidentale." Bruegel, Grünewald, Goya, Rops, Dix, Grosz, Ensor, Munch, Bacon sont ses compagnons de rêverie et la matière de son travail. Mais sa vraie passion, dans laquelle il s'investit à temps plein, est plus radicale : l'assassinat considéré comme un des Beaux-Arts.
Prix BD Polar 2015 Quais du Polar Expérience / Le Petit Bulletin
Grand Prix de la Critique ACBD 2015 -
Adrián Cuadrado est conseiller en communication du Parti Démocratique Populaire, force dominante de l'échiquier politique espagnol vouée à la corruption, aux magouilles financières, aux coups tordus, à la manipulation des consciences et des suffrages. Roi du storytelling, Adrián est l'un de ces spin doctors chargés de produire la lumière qui illuminera le meilleur profil d'un candidat, en fera un produit désirable pour les électeurs. Menteur par vocation, par profession et par nécessité conjugale, il est l'heureux détenteur d'une double vie, entre son épouse et ses deux enfants à Vitoria, et sa maîtresse torride à Madrid. Pour l'heure, sa mission est de faire entrer dans le grand bain national le jeune élu local Javier Morodo, dont l'homosexualité assumée offrira un gaywashing au Parti, trop longtemps accusé d'homophobie. Tâche élémentaire pour Adrián, que vient compliquer la découverte inopinée de trois têtes coupées de conseillers municipaux artistement conservées dans des bonbonnes en cristal. Qui est derrière ces meurtres baroques ? Quel lien les rattache à une opération autour des palais en ruine qui constellent la cité basque ? Soudain, la vie d'Adrián l'imposteur se détraque, menaçant de faire mentir sa devise, selon laquelle « le menteur est un dieu dont le verbe crée des mondes ».
Avec ce tome ultime, la très sombre « Trilogie du Moi » acquiert sa dimension finale. Celle d'une ode lovecraftienne à la ville où l'auteur vit depuis des décennies, où tous les fils se nouent, toutes les trajectoires se recoupent, tous les conflits se terminent (mal le plus souvent) pour tracer le portrait d'une Vitoria noire, gothique, mythique. Celle aussi, majestueuse, d'une cathédrale de papier dédiée à nos modernités perturbées. -
Angel Molinos, docteur en psychologie et écrivain raté, basé à Vitoria comme le héros de Moi, assassin, travaille pour l'Observatoire des Troubles Mentaux (OTRAMENT), centre de recherche affilié aux Laboratoires Pfizin de Houston, qui suit l'évolution des maladies mentales et teste de nouvelles molécules sur des cobayes humains. Sa mission est d'identifier de nouveaux profils "pathologisables" afin d'aider Pfizin à élargir sa pharmacopée.
Les nuits d'Angel sont hantées de cauchemars. De retour dans son village natal, que des rumeurs d'homosexualité l'ont forcé à quitter à l'âge 16 ans, il retrouve son père atteint d'Alzheimer et renoue avec l'homme, devenu moine, qui l'a initié à l'homoérotisme. Il comprend que son métier est lié à ce trauma : il crée des catégories d''anormalité mentale' pour se venger de l'étiquette homosexuelle qui a bouleversé sa vie. Rentré à Vitoria, il décide de rallier la cause d'un collègue qui prétend dénoncer les pratiques d'OTRAMENT. Mais le lanceur d'alerte a disparu, et Angel trouve devant sa porte la main coupée de ce dernier. Ses employeurs auraient-ils décidé de se débarrasser de lui ? L'inventeur de fausses folies serait-il en train de devenir fou ?
Cette histoire de Big Pharma découpant nos vies et nos psychés pour optimiser ses profits pourrait se dérouler partout, mais ses tonalités politiques ajoutent un volet au portrait sans fard de l'Espagne contemporaine qu'Altarriba trace de livre en livre. Et la mystérieuse ville basque de Vitoria, au centre de sa "Trilogie du Moi", devient pour lui ce que Dublin fut pour Joyce ou Providence pour Lovecraft, le lieu mythique d'où sourdent toutes les peurs, toutes les hantises qui habitent ses héros. -
En venant au monde, Petra, la mère de l'auteur, tue sa propre mère. Cette mort en couches est le drame fondateur de sa vie. Dès sa naissance, elle est molestée par un père qui la tient pour fautive de ce "meurtre". Elle vouera pourtant, durant toute son enfance, une dévotion sans borne à cet homme brutal et dépressif, à la fois barbier, marchand de tabac, infirmier, auteur de pièces jouées sur les places de village. Maltraitée, exploitée par le reste de sa fratrie, finalement violée, Petra part en ville se placer comme femme de ménage chez le gouverneur militaire de la région de Saragosse. Là, son dévouement et sa discrétion lui valent rapidement du galon. La voici gouvernante de ce notable, royaliste violemment opposé au régime de Franco, un autre paradoxe espagnol.
C'est une jeune fille pimpante, mais cachant un profond dégoût des hommes, qui épouse finalement Antonio Altarriba Senior, le père de l'auteur. Lequel verra en sa mère une femme craintive et froide, meurtrie par un pays où le machisme sévit sans retenue, réfugiée dans la plus obtuse des ferveurs religieuses. Il devra attendre les derniers instants pour découvrir, sur le lit de mort de Petra, l'impossible secret de son aile brisée, écho déchirant au désir de voler contrarié de son mari, qui dessine d'elle un portrait bien différent de celui qu'il imaginait.