« J'allais conjurer le sort, le mauvais oeil qui me collait le train depuis près de trente ans. Le Voyant d'Étampes serait ma renaissance et le premier jour de ma nouvelle vie. J'allais recaver une dernière fois, me refaire sur un registre plus confidentiel, mais moins dangereux. » Universitaire alcoolique et fraîchement retraité, Jean Roscoff se lance dans l'écriture d'un livre pour se remettre en selle : Le voyant d'Étampes, essai sur un poète américain méconnu qui se tua au volant dans l'Essonne, au début des années 60. A priori, pas de quoi déchaîner la critique. Mais si son sujet était piégé ? Abel Quentin raconte la chute d'un anti-héros romantique et cynique, à l'ère des réseaux sociaux et des dérives identitaires. Et dresse, avec un humour délicieusement acide, le portrait d'une génération.
Après L'Homme nu, la nouvelle enquête de Marc Dugain et Christophe Labbé sur nos comportements de demain.
Ces dernières années ont bouleversé nos vies quotidiennes. Ce bouleversement, qui profite formidablement aux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft), sera durable: autant l'analyser et le comprendre le mieux possible. C'est le pari de Marc Dugain et de Christophe Labbé dans ce nouveau livre, qui se concentre sur ce virage de civilisation pour mieux dessiner la société du futur. Une société où tout sera fait pour éviter les contacts; où chacun, faute de se confronter véritablement à l'altérité, risque de s'enfoncer dans une solitude délirante, au beau milieu du métavers
Télétravail, objets connectés, voitures autonomes, applications de rencontres, paiement sans contact, données personnelles livrées à qui accepte de payer ces data: quel sera l'impact de cette numérisation massive de nos activités quotidiennes?
À mi-chemin entre journalisme et narration littéraire, Marc Dugain et Christophe Labbé portent leur regard sur l'avancée inexorable de ces phénomènes, au point que les politiques se dispensent bien de les évoquer dans leurs programmes. Est-il vraiment trop tard? Resterons-nous humains si plus rien ne nous touche?
Hannah est une Nisei, une fille d'immigrés japonais. Si son père l'a bercée de contes nippons, elle se sent avant tout canadienne ; alors pourquoi les autres enfants la traitent-ils de « sale jaune » ? Jack, lui, est un creekwalker, il veille sur la forêt et se réfugie dans les légendes autochtones depuis le départ de son frère à la guerre. Le jour où l'ermite tombe nez à nez avec un ours blanc au coeur de la Colombie-Britannique, il croit rêver - la créature n'existe que dans les mythes anciens. Pourtant, la jeune femme inconsciente qu'il recueille semble prouver le contraire : marquée des griffes de la bête, Hannah développe d'étranges dons à son réveil. Des années 1920 à l'après-guerre, Marie Charrel brosse le portrait d'une Amérique du Nord où la magie sylvestre s'enchevêtre à la fresque historique. Contes japonais et légendes indigènes se lient dans une fabuleuse ode à la nature et à la fraternité.
«?Ça commence parfois par une inquiétude ou un malaise. On se sent en décalage, on craint d'agir de manière déplacée. On a le sentiment de ne pas "être à sa place". Mais qu'est-ce qu'être à sa place, dans sa famille, son couple, son travail ? Quels sont les espaces, réels ou symboliques, qui nous accueillent ou nous rejettent ? Faut-il tenter de conquérir les places qui nous sont interdites, à cause de notre genre, notre handicap, notre âge, notre origine ethnique ou sociale ? Peut-être faut-il transformer ces lieux de l'intérieur et s'y créer une place à soi ??» Dans cet ouvrage aussi passionnant que sensible, la philosophe Claire Marin explore toutes les places que nous occupons - quotidiennement, volontairement ou contre notre gré, celles que nous avons perdues, celles que nous redoutons de perdre - et interroge ce qui est à la fois la formulation d'un désir personnel et un nouvel impératif social. Encore reste-t-il à savoir si l'on finit tous par trouver une place, ou si le propre d'une place n'est pas plutôt de sans cesse se déplacer, ou de déplacer celui qui croit pouvoir s'y installer...
Qui suis-je vraiment ? À quel point suis-je le résultat d'une culture, d'une descendance, d'une couleur de peau ou d'un genre ? Mes choix de vie sont-ils issus de ma volonté propre ou n'obéissent-ils qu'à des conventions sociales, familiales ? Comment ne pas brimer une partie de moi-même et vivre pleinement ce que je désire ? Tous ces questionnements ont trait à l'identité, devenue la valeur cardinale de notre modernité. À l'échelle politique, c'est ainsi que les communautarismes s'intensifient et que les revendications identitaires se crispent. À l'échelle individuelle, le développement personnel étend son marché et la narcissisation du « moi » s'épanche sur les réseaux. En faisant de l'identité une priorité, notre siècle s'égare. Philosophiquement, l'identité est un concept dont la validité reste incertaine. Politiquement, les dogmatismes identitaires s'exacerbent au point de déstabiliser l'universalisme républicain. Individuellement, l'identité nous fige dans des postures qui nous éloignent de nous-mêmes. Si l'identité est à questionner, quelque chose de cette notion semble toutefois ne pas pouvoir se laisser abandonner : le désir d'être soi-même. Alors, comment parvenir au sentiment de soi sans tomber dans le piège identitaire ? Tel est l'enjeu de ce livre.
Atay et Abay ont toujours eu la tête sur les épaules, aussi Firuzeh et son petit frère, le turbulent Nour, ne sont-ils pas inquiets lorsque leurs parents leur annoncent qu'ils quittent Kaboul. Et puis les deux enfants ont d'autres préoccupations?: d'abord, s'écharper toute la journée, puis écouter les contes d'Abay, enfin se faire des copains dans le camp de fortune où ils sont parqués après leur traversée des mers. Mais alors que les jours deviennent des mois, que les gardes ne cessent de les abreuver d'insultes et de coups et que les médicaments semblent la seule réponse des adultes au malheur, Firuzeh comprend que l'enfance touche à sa fin. Accompagnée par la fantomatique Nasima, sa meilleure amie des fonds marins, la petite fille n'en est qu'au début d'un long voyage. Un récit d'initiation tout en beauté et fragilité, où l'âpreté de la réalité tragique rencontre la poésie et la magie d'un regard d'enfant.
Europe centrale, années 1930. Après avoir fui la révolution russe, les jumeaux Sylvin et Maria Rubinstein se lancent dans le flamenco, avec à la clé un succès international. Quand la guerre les sépare, Sylvin tente de retrouver sa soeur en se déguisant en femme. C'est ainsi qu'il s'engage dans la Résistance et devient un tueur de nazis. A Hambourg, en 2017, une rencontre fait écho à leur histoire.
"Des scientifiques, de plus en plus nombreux, nous promettent que la "révolution de la longévité" est pour demain, que nos petits-enfants pourront vivre cent cinquante ans, voire davantage, encore jeunes et en bonne santé physique et psychique. Ce livre fait le point sur ces recherches, sépare science et fantasmes et pose la question de fond : à quoi bon vivre aussi longtemps ? Face à cette interrogation, deux conceptions de la vie heureuse s'opposent. La première nous vient de ces sagesses anciennes que la psychologie positive remet au goût du jour. Elles nous invitent à dire "oui au réel", à nous résigner à l'ordre naturel des choses afin d'accepter dans la sérénité la vieillesse et la mort. Les modernes philosophies de l'histoire et de la liberté plaident pour une tout autre spiritualité : si une éducation tout au long de la vie, voire une perfectibilité potentiellement infinie, sont le propre de l'Homme, allonger la vie en bonne santé pourrait offrir à l'humanité l'occasion de devenir enfin moins bornée, moins violente, et, pourquoi pas, plus sage qu'elle ne le fut au XXe siècle. Ce sont les termes de ce débat désormais crucial que présente ce livre."
L.F.
Île de Jersey, 1959. Pour survivre à la cruauté et à la tristesse de l'orphelinat, Lily puise tout son courage dans le chant des oiseaux, l'étrange amitié partagée avec un ermite du fond des bois et l'amour inconditionnel qui la lie au Petit.
Soixante ans plus tard, une jeune femme se rend à Jersey afin d'enquêter sur le passé de son père. Les îliens éludent les questions que pose cette étrangère sur la sordide affaire qui a secoué le paradis marin. Derrière ce décor de rêve pour surfeurs et botanistes se dévoilent enfin les drames tenus si longtemps secrets.
"Dès que je rentre, je me mets à écrire. La dernière chose que je pensais faire dans ma vie était d'écrire un livre. Mais j'ai eu besoin de raconter cette histoire folle. L'histoire de ma famille, une famille heureuse et aimante dont la vie a basculé. J'ose espérer que le récit de ces événements permettra de mieux les comprendre. Je suis la femme de Roman Polanski. Il est, selon qui vous êtes, l'incarnation d'une génération, un survivant, un mythe, un génie, un salaud. À une époque où l'on préfère ce qui est vraisemblable à ce qui est vrai, j'ai voulu allumer un contre-feu."
Une vie incendiée est le récit inédit, poignant et intime d'Emmanuelle Seigner. Une prise de parole qui fait la lumière sur une histoire hautement médiatisée, une affaire sensible, complexe, aux répercussions dévastatrices pour de nombreuses personnes, à commencer par elle-même. L'actrice prend courageusement la parole pour la première fois et livre enfin sa vérité.
« Je sais bien ce que je fuis, mais non pas ce que je cherche », expliquait Montaigne à propos de la longue chevauchée qu'il fit à travers l'Europe en 1580. Gaspard Koenig aussi sait ce qu'il fuit : les injonctions permanentes des gouvernements et des algorithmes. Il s'est donc lancé sur les traces de Montaigne, en suivant le même itinéraire, avec le même moyen de transport : un cheval, ou plutôt une jument, Destinada. Pour rejoindre Rome, le cavalier et sa monture ont parcouru 2 500 kilomètres pendant cinq mois, passant par le Périgord, la Champagne, les Vosges, la Bavière, la Toscane... Toquant aux portes pour trouver gîte et couvert, parcourant les campagnes mais aussi les zones commerciales et les centres-villes, l'écrivain a eu tout le loisir de « frotter et limer sa cervelle contre celle d'autrui », comme le recommandait Montaigne. Dans cette plongée au coeur des territoires, la générosité et l'hospitalité sont presque toujours au rendez-vous. Au rythme du pas, notre modernité révèle ses vertus et ses travers. L'occasion pour l'auteur de renouer avec certains thèmes chers à Montaigne : la relation entre l'homme et l'animal, l'art du dépouillement, les conflits religieux, la diversité des cultures ou les leçons de la nature... Au fond, que Gaspard Koenig pouvait-il bien chercher dans un tel vagabondage, sinon la liberté ? La sienne, celle que l'on cultive dans cette « arrière-boutique » où se réfugiait Montaigne. Mais aussi la nôtre, exigence politique plus contemporaine que jamais.
Cet été-là, rien ne sera pareil, elle le sent. D'abord, c'est Titi, sa mère et soeur deux en un, qui la laisse tomber pour aller conter fleurette au conducteur de ferry. Et Élène, qui tient si bien les services sociaux à distance, vient l'embêter avec des histoires de puberté - même que c'est pour ça que son corps change. Elle, le changement, ça ne lui dit rien?; elle est déjà suffisamment différente comme ça, avec ses doigts croches et ses cheveux de lainages. Et puis il y a cet étranger qui se baigne dans sa rivière, auprès de qui elle se sent bizarre et plus grande tout à coup. Cet été-là, c'est sûr, rien ne sera pareil. Stéphanie Boulay dissèque les tourments d'une adolescente sublimement discordante. Une voix déroutante, unique, d'une grande force poétique.
Les auteurs s'interrogent sur la place de la liberté d'expression dans les sociétés occidentales contemporaines. Au-delà de dénoncer des injustices, la libération de la parole a également entraîné certaines dérives : propos haineux, harcèlement en ligne, fake news, entre autres. Selon eux, il est nécessaire de réapprendre à parler pour sauver l'humanité.
À l'aube des années 1960, la jeune Sylvia fait déjà parler d'elle : poète admirée de ses contemporains, elle forme avec Ted le couple d'écrivains en vogue. Après une période difficile en hôpital psychiatrique, Sylvia aspire au bonheur et c'est dans la famille qu'elle le trouvera, affirme-t-elle : c'est elle qui insiste pour quitter Londres et s'installer à la campagne, la petite Frieda à son bras et Nicholas dans le ventre. Mais dans cet havre de paix, rien ne se passe comme elle l'avait prévu : accaparée par les tâches du quotidien, la pression familiale et ses propres obsessions, la jeune femme n'a plus le temps d'écrire. Et à mesure que la vie de Ted, de plus en plus demandé à Londres par ses éditeurs et ses maîtresses, prend un nouvel essor, celle de Sylvia se délite irrémédiablement...
Elin Cullhed imagine la dernière année de Sylvia Plath et épouse son style foudroyant, la noirceur lumineuse de la vie de l'écrivaine. Une oeuvre monumentale qui se fait le témoin d'un destin hautement symbolique : la "folie" de Plath n'est-elle pas, tout compte fait, celle du monde et de ses contradictions ? Traduit du suédois par Anna Gibson.
Sensible, rêveur, Célian ne s'épanouit pas à l'école. Sa mère Mary, à la suite d'une rupture amoureuse, décide de partir avec lui dans une île légendaire de la mer Baltique. C'est là en effet qu'à la Renaissance, Tycho Brahe - astronome dont l'étrange destinée aurait inspiré Hamlet - imagina un observatoire prodigieux depuis lequel il redessina entièrement la carte du Ciel.
En parcourant les forêts et les rivages de cette île préservée où seuls le soleil et la lune semblent diviser le temps, Mary et Célian découvrent un monde sauvage au contact duquel s'effacent peu à peu leurs blessures.
Porté par une écriture délicate, sensuelle, ce premier roman est une ode à la beauté du cosmos et de la nature. L'Enfant céleste évoque aussi la tendresse inconditionnelle d'une mère pour son fils, personnage d'une grande pureté qui donne toute sa lumière au roman.
Dans son choix grec, la philosophie a pensé la vie, mais non pas vivre ; et le religieux, qui prenait en charge la question du vivre, est aujourd'hui en retrait. De là que vivre soit laissé en friche, abandonné au prêche ou bien au truisme ; et que prospèrent le Développement Personnel et le marché du Bonheur vendant vivre comme du "tout positif". Or vivre est paradoxal, s'étendant du vital au vivant. Il est à la fois la condition de toutes les conditions : être en vie ; et l'aspiration de toutes nos aspirations : vivre enfin ! Nous sommes en vie, mais nous n'accédons pas pour autant à vivre. Car la vie d'elle-même rabat la vie. De là que nous puissions être nostalgiques de la vie au sein même de la vie - ou que "la vraie vie est absente". Or, c'est à travers cette inanité même de "la vie" que nous pourrons voir transparaître à l'envers l'inouï de vivre débordant le déjà vécu et l'ouvrant à de l'"in-vécu", quitte à s'y heurter à de l'Invivable ; et, puisque vivre n'est, au fond, qu'ouvrir des possibles, nous pourrons alors rouvrir des possibles dans nos vies, au lieu de les laisser s'étioler. Car répéter qu'il faut "cueillir le jour", "profiter de la vie", n'a pas prise sur la vie. Traçons donc plutôt, pour nous y repérer, une carte de ces possibles intensifs entre lesquels décider vivre. Vivre y reparaît alors dans sa ressource, dans son essor, dans son "matin", dégagé de ce qui l'enlisait, au fil des jours, et l'emmurait. Telle est la "transparence du matin", en amont de tous les enseignements de la morale.
F. J.
Au xve siècle, dans le Japon médiéval, Kotaro et Hikojiro, deux intouchables, grandissent avec un seul rêve : intégrer l'escadron des jardiniers du shogun et marcher dans les pas de leur modèle, le grand moine zen, Ikkyu Sojun. Les frasques et provocations de ce moine rebelle marquent l'époque autant que ses prodigieux talents. Tout enfant, il est arraché à sa mère, suit l'enseignement rigide des monastères et connaît enfin l'éveil, lors d'une promenade méditative, lorsqu'il entend le « chant du corbeau ». Suivent trente ans d'errance. Refusant les titres et les honneurs, cet électron libre poursuit son zen à lui, passe du temple au bordel, tombe sur le tard follement amoureux d'une chanteuse aveugle, écrit de sublimes poètes érotiques qu'il jette au vent... À si bonne école, comment les deux parias parviendront-ils à sortir de leur misère ?
«?La Chine ne peut pas exister sans l'Occident?», entend-on souvent. En est-on vraiment sûr ? Alice Ekman prend acte de la fin d'une époque, celle d'une Chine relativement ouverte, et analyse avec précision le début d'une autre, celle de la dissociation des mondes, et de l'émergence de ce qu'elle dénomme la «?bimondialisation?», structurée par des groupes de pays ennemis. Car c'est un fait?: la Chine se ferme à l'Occident, et aux États-Unis en premier lieu, dans un contexte de tensions commerciales et technologiques prolongées. En parallèle, Pékin tente de bâtir une coalition alternative de pays, d'élargir son «?cercle d'amis?», au coeur duquel se trouve la Russie. La Chine de Xi Jinping est désormais pleinement entrée dans une rude compétition entre systèmes politiques, et semble prête à payer le coût de ses choix idéologiques et géostratégiques. Le commerce n'adoucit pas les moeurs. Grâce à sa fine connaissance de la politique étrangère chinoise et son travail de synthèse, Alice Ekman parvient ici à mettre en perspective des centaines de déclarations officielles, chiffres, témoignages et exemples concrets collectés au cours de ces trois dernières années, pour rendre compte de la nouvelle restructuration du monde, avec clarté et efficacité.
2 mai 1923. Comme chaque jour, Clemenceau s'installe à sa table de travail. Malgré ses 82 ans, il n'a rien perdu de sa flamboyance ni de son orgueil. À l'aube du XXe siècle, alors que la République l'a remercié, le « Père la Victoire » ignore ce matin-là qu'il se prépare à vivre ses années les plus passionnées. Marguerite Baldensperger, éditrice de quarante ans sa cadette, s'apprête à passer sa porte pour lui proposer d'écrire un livre. Dès lors, leurs destins seront liés. Pourtant, tout les oppose. Elle aussi réservée et discrète que le « Tigre » est colérique et tempétueux. Mais dès leur rencontre, un pacte les unit : « Je vous aiderai à vivre , vous m'aiderez à mourir. » Marguerite surmontera ainsi le grand chagrin de sa vie et reprendra goût à l'existence. Clemenceau puisera dans sa présence une vigueur nouvelle pour le combat politique et retrouvera la fougue de ses anciennes batailles. Malgré les années qui les séparent, ils vont s'aimer, chacun à leur façon.
Par sa plume enlevée, réjouissante et ironique, Nathalie Saint-Cricq fait revivre la grande figure de Georges Clemenceau, son terrible caractère, ses mots d'esprit dévastateurs, et, avant tout, son coeur ardent.
Aujourd'hui où l'on ne peut plus tracer de plan de la Cité idéale et où les lendemains «?ne chantent plus?», peut-on faire autre chose que défaire ce qui bloque l'état présent des choses pour y rouvrir des possibles ? Or, qu'est-ce qui bloque si ce n'est des coïncidences idéologiques installées et paralysant la société ? Ne pouvant les renverser (comment en aurait-on la force ?) et les dénoncer ne s'entendant pas, on ne peut que les fissurer?: localement, sur le terrain, chacun en ayant l'initiative là où il est. Mais ces dé-coïncidences se relient et se relaient, elles se répondent et peuvent s'associer. Une Association en est née. Car «?c'est quand même avec des fissures que commencent à s'effondrer les cavernes?». F. J.
Le mou dégoûte, effraie, agace. Indécis et inconstant, il nous renvoie à notre propre dégénérescence. De la pieuvre à la morve en passant par l'apathie du flemmard, il indispose. Mais cette mollesse tant décriée est également matière de transition, elle évoque la fluidité, le flottant et la douceur, le réconfort d'un beignet moelleux. Et le temps du relâchement et de la contemplation n'est-il pas celui de la pensée créatrice ? Le mou est souple, insaisissable... dissident ! Sa réhabilitation, pourtant, n'est pas évidente. Les philosophes mènent la vie dure au mou : ainsi Alexis de Tocqueville conspue-t-il la « mollesse des moeurs » de l'homme démocratique, abêti et conformiste, et la fin des émotions nobles et brillantes. Jean-Jacques Rousseau n'est pas tendre non plus, lui qui déplore que les enfants soient « amollis avant que de naître par la mollesse des pères et des mères, [d']un tempérament déjà gâté ». Aujourd'hui encore, l'adolescent avachi dans son canapé inspire impatience et crispation. De la léthargie politique à la mozzarella, de l'impuissance aux tentacules, du coup de mou au pouvoir du jogging, la philosophe Géraldine Mosna-Savoye cherche à redonner sens et valeur au mou.
Parce qu'il est depuis longtemps un intellectuel engagé, et parce qu'il a été candidat à la dernière élection présidentielle, Gaspard Koenig occupe une position unique pour analyser notre système politique actuel. Son récit de campagne très concret, souvent drôle, ouvre sur une critique radicale de nos institutions, qui font primer les personnes sur les idées. Si de nombreux auteurs, comme Aron, Mitterrand ou Revel, ont déjà dénoncé le présidentialisme de la Ve République, Gaspard Koenig s'attaque cette fois à un véritable tabou en remettant en question l'élection du président au suffrage universel. Contre la conception gaulliste de la souveraineté, il propose une autre vision de la société, plus décentralisée, et imagine à quoi pourrait ressembler la démocratie de demain.
Le mérite est un beau mot, qui cimente la République française et honore ses citoyens. Hélas, cette valeur républicaine, née des Lumières, défendue par Voltaire et Beaumarchais, est désormais attaquée tous les jours et de toutes parts?: assaut contre les bourses au mérite pour les étudiants modestes sous le quinquennat Hollande?; détournement des internats d'excellence durant le premier mandat d'Emmanuel Macron?; nivellement par le bas pratiqué depuis des années par le ministère de l'Éducation nationale... Pire?: pour nombre de ses contempteurs, le mérite ne serait plus qu'une vitrine trompeuse, qui dissimule mal la reproduction des élites. Ils poursuivent sans relâche cette notion de leur haine, alors qu'ils sont les principaux responsables de ses dévoiements. Mais que serait la République sans le mérite ? Pour sauver cette idée magnifique, cette promesse de la Nation française, il faut mettre au jour les hypocrisies, les cynismes et les lâchetés qui veulent l'assassiner. C'est le but de cette enquête. Le temps presse pour défendre cette juste cause?: car la méritocratie, comme la démocratie, est le pire des systèmes, à l'exception de tous les autres.
"Ce livre est l'histoire de mes mensonges.
Sans doute est-ce le plus risqué que j'écrirai jamais.
Il m'est vital.
Jusqu'où suis-je allé dans l'aveu ? Je n'ai pris aucun ménagement.
Un jour, il faut bien déchirer le voile, rompre avec le comédien et coïncider avec soi."