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"Dans ces douze cahiers, que Kafka qualifie parfois de Journal, observations de vie quotidienne, rêves, visions, fulgurations, réflexions et même dessins alternent avec de multiples débuts de récit, certains répétés comme s'il s'agissait de réchauffer un moteur narratif refroidi. Dans cette galaxie brille un seul récit achevé, Le Verdict, écrit d'une traite une nuit de 1912, devenu pour l'écrivain le modèle du bonheur de raconter.
Mille et une nuits d'écriture de notations et de récits qui mettent en scène les affres et les exaltations de celui qui dit de lui-même :
Finir prisonnier - ce serait un but dans la vie. Mais c'était une cage entourée d'une grille... comme s'il était chez lui le bruit du monde affluait et ressortait par la grille, en fait le prisonnier était libre, il pouvait avoir part à tout, rien au dehors ne lui échappait... il n'était même pas prisonnier.
Loin des sanctifications et des discordes, ces carnets nous font entrer avec Kafka au pays de l'écriture."
Dominique Tassel -
Léviathan de Hobbes (qui paraît en 1651) est un des rares textes fondateurs de la philosophie, comme la République de Platon, auquel son auteur le comparait. Il jette, en effet, les bases de la tradition politique moderne, en inventant le mythe de la souveraineté : considérant leur état naturel, effrayés par l'exacerbation mortelle de leurs passions, les hommes décidèrent, par leur faculté propre de vouloir et de penser, de se doter d'une loi commune, artificielle, qu'un individu ou une assemblée aura pour tâche d'élaborer et de mettre en oeuvre. Avec Hobbes, l'histoire se substitue à la théologie : ce n'est plus dans le divin que la loi se fonde, mais dans l'humanité.
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De l'inégalité parmi les sociétés ; essai sur l'homme et l'environnement dans l'histoire
Jared Diamond
- Gallimard
- Folio essais
- 30 Septembre 2020
- 9782072931581
La question essentielle, pour la compréhension de l'état du monde contemporain, est celle de l'inégale répartition des richesses entre les sociétés : pourquoi une telle domination de l'Eurasie dans l'histoire ? Pourquoi ne sont-ce pas les indigènes d'Amérique, les Africains et les aborigènes australiens qui ont décimé, asservi et exterminé les Européens et les Asiatiques ?
Cette question cruciale, les historiens ont renoncé depuis longtemps à y répondre, s'en tenant aux seules causes prochaines des guerres de conquête et de l'expansion du monde industrialisé. Mais les causes lointaines, un certain usage de la biologie prétend aujourd'hui les expliquer par l'inégalité supposée du capital génétique au sein de l'humanité.
Or l'inégalité entre les sociétés est liée aux différences de milieux, pas aux différences génétiques. Jared Diamond le démontre dans cette fresque éblouissante de l'histoire de l'humanité depuis 13 000 ans. Mobilisant des disciplines aussi diverses que la génétique, la biologie moléculaire, l'écologie des comportements, l'épidémiologie, la linguistique, l'archéologie et l'histoire des technologies, il marque notamment le rôle de la production alimentaire, l'évolution des germes caractéristiques des populations humaines denses, favorisées par la révolution agricole, le rôle de la géographie dans la diffusion contrastée de l'écriture et de la technologie, selon la latitude en Eurasie, mais la longitude aux Amériques et en Afrique. -
John Dewey (1859-1952) est un des piliers du pragmatisme. Au centre de cette tradition, il y a l'enquête, c'est-à-dire la conviction qu'aucune question n'est a priori étrangère à la discussion et à la justification rationnelle.
Dewey a porté cette notion d'enquête le plus loin : à ses yeux, il n'y a pas de différence essentielle entre les questions que posent les choix éthiques, moraux ou esthétiques et celles qui ont une signification et une portée plus directement cognitives. Aussi aborde-t-il les questions morales et esthétiques dans un esprit d'expérimentation - ce qui tranche considérablement avec la manière dont la philosophie les aborde d'ordinaire, privilégiant soit la subjectivité et la vie morale, soit les conditions sociales et institutionnelles.
Dans L'art comme expérience, la préoccupation de Dewey est l'éducation de l'homme ordinaire. Il développe une vision de l'art en société démocratique, qui libère quiconque des mythes intimidants qui font obstacles à l'expérience artistique. -
Trois essais sur la théorie sexuelle
Sigmund Freud
- Gallimard
- Folio essais
- 22 Mars 2024
- 9782073076236
"Devant le fait que les penchants sexuels étaient largement répandus, l'idée s'imposa à nous que la prédisposition aux perversions était la prédisposition originelle et universelle de la pulsion sexuelle humaine, à partir de laquelle le comportement sexuel normal se développait au cours de la maturation sous l'effet de modifications organiques et d'inhibitions psychiques. Nous espérions dégager la prédisposition originelle dans l'enfance ; parmi les forces qui délimitent l'orientation de la pulsion sexuelle, nous avons mis en évidence la pudeur, le dégoût, la compassion et les constructions sociales de la morale et de l'autorité. C'est ainsi que nous avons été amenés à voir dans chaque déviation fixée de la vie sexuelle normale une part d'inhibition du développement et d'infantilisme."
Sigmund Freud -
Les passagers, munis de titres de transport électroniques, de bagages de cabine passés aux rayons X, attendent, guidés par un personnel aux uniformes seyants et sous l'oeil d'une police affairée à regarder les écrans de contrôle de sécurité, d'embarquer pour Wapenamanda, Goroka, Kikori, Kundiawa et Wewak. Nous sommes à Port Moresby, capitale de la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Rien que de normal.
L'essentiel est ailleurs : ces hommes d'équipage, ces policiers à gadgets électroniques et ces passagers coutumiers de l'avion sont les descendants directs de ces millions de Papous, découverts par une expédition australienne en 1931, vivants isolés dans leurs diverses vallées montagneuses, en petites sociétés closes, dépourvues d'écriture, de monnaie, d'écoles et de gouvernement centralisé, à un âge trop vite jugé "de pierre". En quelque quatre-vingts années, la population des Highlands de Nouvelle-Guinée a vécu des changements qui prirent des millénaires à advenir dans le reste du monde.
Jared Diamond, qui découvrit la Nouvelle-Guinée en 1964 pour sa première étude de terrain ornithologique, pose la question, rarement envisagée : que nous apprennent ces Papous de ce que les Occidentaux ont perdu avec la disparition des sociétés traditionnelles - ces sociétés structurées en groupes de faible densité de population (allant de quelques dizaines à quelques milliers d'individus), subsistant de la chasse et de la cueillette, de la culture ou de l'élevage, et que les contacts avec les grandes sociétés industrielles ont transformées de façon limitée ?
Elles ont en effet inventé des milliers de solutions aux problèmes humains différentes de celles adoptées par nos sociétés modernes. Certaines - par exemple, des manières d'élever les enfants, de traiter les personnes âgées, de demeurer en bonne santé, de bavarder, de passer le temps libre, de pratiquer le multilinguisme ou de régler les litiges - semblent supérieures à celles des pays occidentalisés et riches. Les sociétés traditionnelles peuvent nous inspirer quelques meilleures pratiques de vie, mais également nous aider à évaluer d'autres avantages de notre propre société que nous avons fini par considérer comme normaux. -
Un jour, les frères...
À l'origine du lien social, ce jour-là : les frères se coalisent pour mettre fin à la tyrannie du père de la horde primitive, un chef qui détient tous les pouvoirs et se réserve la jouissance des femelles ; ils le dévorent et chacun d'eux, par ce festin cannibalique, s'approprie une partie de sa puissance.
Une alliance entre semblables, un crime collectif, une grande fête, tel serait notre commencement, tel serait le fondement de la société humaine. "Au commencement était l'acte." Et quel acte ! Après quoi s'instaure la culpabilité face au père mort, avec son corollaire : la vénération du totem ou du dieu. Après quoi prédomine l'horreur, le tabou, de l'inceste - l'horreur, par seulement l'interdit -, avec sa conséquence : l'exogamie.
Un mythe, cette thèse scandaleuse que Freud, après une longue enquête menée avec passion à travers la littérature ethnologique de l'époque (Frazer entre beaucoup d'autres), énonce dans le dernier des quatre essais de Totem et tabou ? Un mythe, un roman des origines ou bien la révélation, difficile à admettre au point d'être refoulée, que toute société repose sur un crime commis en commun et ne se maintient dans sa cohésion que par lui ? -
La place du spectateur ; esthétique et origines de la peinture moderne
Michael Fried
- Gallimard
- Folio essais
- 19 Avril 2017
- 9782072721557
Voici un ouvrage dont le titre à soi seul est devenu une expression commune. Il est vrai que Michael Fried a posé en des termes tout à fait nouveaux la question : de quand date la peinture moderne? De David, de Manet, de Cézanne, dira-t-on ; les candidats à l'acte fondateur ne manquent pas. Fried pose autrement le problème. Moins qu'aux grandes individualités, c'est à ce qu'elles eurent en commun que l'auteur s'intéresse : le courant nouveau de figuration qui très vite devint la tradition moderne et auquel ces peintres participèrent ou s'opposèrent.
Cette tradition naît au XVIIIe siècle avec la critique d'art - notamment Diderot - et celle-ci formule une interrogation : quelle place le tableau doit-il réserver au spectateur ?
De Greuze à David, la peinture refuse la théâtralité. Michael Fried montre les deux moyens que Diderot expose pour combattre la fausseté de la représentation et la théâtralité de la figuration : une conception dramatique de la peinture, qui recourt à tous les procédés possibles pour fermer le tableau à la présence du spectateur, et une conception pastorale qui, à l'inverse, absorbe quasi littéralement le spectateur dans le tableau en l'y faisant pénétrer. Ces deux conceptions se conjuguent pour nier la présence du spectateur devant le tableau et mettre cette négation au principe de la représentation. -
La fabrique du sexe ; essai sur le corps et le genre en Occident
Thomas Laqueur
- Gallimard
- Folio essais
- 15 Octobre 2013
- 9782072482038
L'Occident n'a cessé depuis les origines de s'interroger sur la différence des sexes. Mais parle-ton de l'homme et de la femme que l'on a encore rien dit : se réfère-t-on au genre - définition culturelle par des qualités morales, affectives, sociales... - ou au sexe - définition par des spécificités anatomiques ?
Jamais, en effet, les deux notions ne se recouvrirent. Dès l'Antiquité, Aristote, par la définition de l'ordre des êtres, et Galien, par la définition du corpus anatomique, fondent le modèle du sexe unique, qui sera dominant jusqu'au XVIIIe siècle, et dans lequel le genre définit le sexe.
Au XVIIIe siècle, émerge l'autre modèle de la différence sexuelle : le modèle des deux sexes, dans lequel, au contraire du premier, le sexe définit le genre : parce que, au niveau de l'anatomie comme de la physiologie, femmes et hommes sont incommensurablement différents, les genres définissent dès lors qualités, vertus et rôles selon des racines biologiques.
Ces deux modèles, toutefois, ne se succèdent pas dans une histoire linéaire : dès le XVI> siècle, des auteurs posaient l'irréductible différence anatomique ; au XXe siècle encore, d'autres - tel Freud - pensent la sexualité selon le modèle du sexe unique... Les deux modèles coexistent dans le temps ; si leur prégnance sur les esprits peut être liée à des évolutions générales - économiques, culturelles, sociales - elle ne peut en aucun cas être strictement expliquée par celles-ci, et moins encore par les progrès de la connaissance anatomique qui se moulent le plus souvent dans les représentations dictées par chacun de ces modèles... -
Dans Reconstruction en philosophie, initialement paru en 1920 mais rédigé aux lendemains de la 'crise de civilisation' que fut la Première Guerre mondiale, John Dewey, un des piliers du 'pragmatisme', et porté par la conviction qu'aucune question n'est a priori étrangère à la discussion et à la justification rationnelle, refuse de s'en tenir aux diagnostics désenchantés. Tout au contraire, il
s'attache à développer avec confiance la capacité de la philosophie à aborder réellement les problèmes du présent : 'La reconstruction
doit faire pour le développement de l'enquête dans le domaine de l'humain, et donc, dans le domaine de l'éthique, ce que les philosophes des derniers siècles ont fait pour la promotion de l'enquête scientifique dans le domaine de la vie humaine, envisagée du point de vue physique et physiologique.' Et de préciser : 'Poser le problème de la reconstruction en philosophie consiste à se demander comment vont évoluer les nouveaux mouvements scientifiques ainsi que la situation humaine, politique et industrielle qui en découle. Pour être fidèles à l'esprit de l'élan qui les anime, ils ne peuvent connaître leur apothéose que si l'on peut en parler en termes de fins et de normes si spécifiquement humaines qu'ils en constitueront un nouvel ordre moral. -
L'oeuvre de Schopenhauer reste en France encore largement méconnue. Disséminée en de multiples opuscules de philosophie digeste et d'aphorismes divertissants, elle a ainsi vu son unité malmenée au gré des publications tronquées. La parution d'une traduction inédite du Monde comme volonté et représentation dans cette même collection (Folio Essais) a déjà offert l'occasion de reporter l'attention sur l'entreprise proprement philosophique de Schopenhauer, sur l'intention fondatrice qui unit tous ces développements éparpillés au gré des découpages éditoriaux.
Les Lettres qui vont de 1803 à quelques semaines avant sa mort en 1860 permettent de mettre en perspective les écrits de Schopenhauer, l'unité de son oeuvre forgée au cours des années, mais aussi les incompréhensions auxquelles il s'est heurté, les malentendus qu'il a dû dissiper. Au fil des ans s'observe la diversité des thèmes et des correspondants à proportion de la gloire et de l'influence ascendante du maître de Nietzsche, particulièrement sur ces disciples qu'il ne craint pas d'appeler ses "apôtres" et ses "évangélistes". -
L'oeuvre de Schopenhauer reste en France encore largement méconnue. Disséminée en de multiples opuscules de philosophie digeste et d'aphorismes divertissants, elle a ainsi vu son unité malmenée au gré des publications tronquées. La parution d'une traduction inédite du Monde comme volonté et représentation dans cette même collection (Folio Essais) a déjà offert l'occasion de reporter l'attention sur l'entreprise proprement philosophique de Schopenhauer, sur l'intention fondatrice qui unit tous ces développements éparpillés au gré des découpages éditoriaux.
Les Lettres qui vont de 1803 à quelques semaines avant sa mort en 1860 permettent de mettre en perspective les écrits de Schopenhauer, l'unité de son oeuvre forgée au cours des années, mais aussi les incompréhensions auxquelles il s'est heurté, les malentendus qu'il a dû dissiper. Au fil des ans s'observe la diversité des thèmes et des correspondants à proportion de la gloire et de l'influence ascendante du maître de Nietzsche, particulièrement sur ces disciples qu'il ne craint pas d'appeler ses "apôtres" et ses "évangélistes". -
Du temps acheté ; la crise sans cesse ajournée du capitalisme démocratique
Wolfgang Streeck
- Gallimard
- Folio essais
- 8 Février 2018
- 9782072765551
Le "capitalisme démocratique" - ce régime économique qui, jusqu'aux années 1970, achetait l'adhésion des populations occidentales grâce à la promesse d'un constant progrès de leur condition sociale - est entré en crise dès les années 1980 : suite à la résistance à l'impôt des producteurs de richesses financières et à leur lutte pour les allègements fiscaux, un nouveau régime se met en place, marqué par l'inflation et les dé
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Sur l'histoire du mouvement psychanalytique
Sigmund Freud
- Gallimard
- Folio essais
- 26 Juin 2014
- 9782072404603
À l'origine de ce livre, une circonstance bien particulière : il y a péril en la demeure et urgence à le conjurer. Pour la première fois, la psychanalyse est menacée du dedans. Auparavant les attaques étaient venues du dehors. Elles n'avaient pas manqué ni cessé et Freud ne s'en était guère soucié. Il n'avait pas de goût pour la polémique, disait-il, et la jugeait vaine. La psychanalyse - la sienne, la seule qui ait droit à ce nom - finirait bien par être reconnue pour ce qu'elle est, le temps ferait son oeuvre avec la poursuite de l'oeuvre.
La situation change du tout au tout quand ce sont des proches, et au premier chef Jung, le 'prince héritier', qui s'affirment psychanalystes alors qu'aux yeux de Freud ils ont cessé de l'être. Il n'est plus permis de se taire, il faut engager le fer. Et, quoiqu'il s'en défende ici et là, c'est un texte vigoureusement polémique qu'écrit Freud, un texte qui, pour avoir été longtemps négligé, retrouve une singulière actualité en ce temps d'éclatement de la 'communauté' psychanalytique.
Nous sommes au début de l'année 1914, quelques mois avant que ne se déchaîne l'autre guerre, la Grande...